mercredi 18 mai 2016

Deep South trip, 17 mai : Indianola, Leland, Greenville et Benoit

Notre dernière journée dans le delta s'est révélée riche en émotions. Avant d'y passer, entre barbecue, amitiés et B.B. King, petit récapitulatif de la journée d'hier :

Bien
- J'ai réussi à soigner mon ampoule infectée en mode Man vs Wild, et pour l'instant, ça tient !
- On a vu notre premier flingue (qui n'était pas en rayon) sans se prendre de balle
- Le bourbon
- Les photos de la nature entre Beulah et Rosedale
- Le Hopson et sa pure ambiance de juke joint
- Le concert de Watermelon Slim
- La rencontre des bikers toulousains

Pas bien
- On n'a pas trouvé les carrefours de Beulah et Rosedale
- Les ampoules infectées, ça fait maaaaaaaaaaaal
- On a vu notre premier flingue (qui n'était pas en rayon)
- Le bourbon
- L'accueil réservé par le personnel du Kroger de Clarksdale

Soit, au final, une très bonne journée.

Aujourd'hui reste sur la lancée. Au programme :
- bayous urbains et musée de B.B. King à Indianola
- visite rapide à Kermit la grenouille à Leland, ville du premier scénario du jeu Mississippi
- verre à Greenville, tombe de chevalier, coucher de soleil et étoiles plein les yeux

Mardi 17 mai, 9h30, Benoit, MS


Le réveil est un peu difficile, et le Four Roses (small batch) montre qu'il a des épines. Très bonne surprise au réveil : mon talon droit est tout réparé ! Alors que l'infection apparente de l'ampoule commençait à me faire paniquer (je préfère m'acheter un harmonica que de payer le médecin), visiblement, la décision d'hier a payé : après avoir nettoyé la plaie, percé, tout extrait et ensuite désinfecté et trempé dans un bon bain de pied, tout est réparé, et ce matin, je peux galoper sans la moindre douleur. Eustace vient nous rendre visite pour apporter une nouvelle décoration à la cabane de chasseur : une énoooorme tête de sanglier (c'est authentique et dans le thème, au moins). Il nous propose de nous faire visiter la Baby Doll House : première constatation, il y fait très frais. Les murs sont presque froids quand on les touche, et les hauts plafonds semblent évacuer la chaleur. En voyant d'anciennes photos de la maison, presque délabrée, on constate le travail de forçat qu'il a réalisé pendant 7 ans. A l'étage, l'une des pièces est un musée en devenir, et entre autres objets des années 20, nous découvrons quelques fossiles, dont des dents et des défenses de mastodontes américains. Après cette visite, nous préparons le déjeuner et mangeons dans le jardin, à l'ombre d'un grand arbre, accompagné par les chiens qui espèrent un ou deux restes. Une petite bise nous rafraîchit, mais après avoir visité la maison, il fait chaud, trèèèèès chaud dehors.

Mardi 17 mai, 15h00, Indianola, MS

Après une petite heure de voiture, nous arrivons à Indianola, ville d'un peu plus de 10.000 âmes où a travaillé B.B. King avant de devenir l'âme du Blues. A peine arrivé dans le centre ville que nous faisons une halte sur la North Sunflower Avenue : de part et d'autre de la route, nous apercevons deux magnifiques bayous (entre le West Prong Bayou et le Short Bayou) recouverts de mousse verte, type de décor que nous n'avons pas encore eu l'occasion d'immortaliser jusqu'ici. C'est assez dément de se dire que nous avons une telle vue en étant au centre d'une (certes petite) ville (mais ville quand même). Et, à un moment, on voit la surface de l'eau s'agiter ici et là : il y a de la vie là-dessous, et pas que du poisson, c'est à peu près certain (Wikipedia me confirmera ce soir qu'il y a bien quelques alligators dans le coin). Nous nous rendons ensuite au B.B. King Museum, où on est mis dans l'ambiance dès le parking, avec The thrill is gone diffusé sur hauts-parleurs. Nous attaquons ensuite la visite. Je ne vous fais pas le détail (car je suis très mauvais pour expliquer les musées), mais, en gros :
- rien que pour les instruments, possessions personnelles et reconstitutions du bureau de travail du Blues King, ça vaut le détour
- rien que pour les documentaires passées en sessions de 10 minutes, ça vaut le détour
- rien que pour la remise en contexte de la ségrégation de l'époque et de l'évolution des mœurs, ça vaut le détour
- rien que pour le portrait du monsieur qui est dégagé par les différents témoignages de ses collaborateurs, ça vaut le détour, et c'est grave inspirant (surtout quand ils s'attardent sur le coté routard, proche du public et workalcoholic qui lui ont valu tous ses mariages et sa santé)
Bref, si vous passez dans le coin, ça vaut largement ses 15$, et en sortant, vous aurez juste envie d'avoir 1/10e de l'énergie, du positivisme et de la bonne humeur de feu-B.B. King.

Nous passons ensuite à Leland, ville proche, car c'est ici que j'avais placé (complètement au pif) le premier scénario de la campagne de Mississippi - Tales of a Spooky South. Et c'est aussi le lieu d'enfance de Jim Henson, créateur des Muppets : c'est d'ailleurs ici-même qu'il a créé le personnage de Kermit la grenouille, qui a le droit à son petit mémorial dans un petit musée du 415 S Deer Creek Street. Le musée est fermé, mais l'endroit est très joli et nous en profitons pour prendre pas mal de photos (dont celles d'un magnifique pont de bois derrière le musée).

Mardi 17 mai, 17h00, Greenville, MS

Après avoir repris la voiture, nous nous rendons enfin à Greenville, avec pour premier objectif une destination des plus joyeuses : le cimetière de Main Street. Mais pas pour voir n'importe quel tombe : c'est pour voir celle de LeRoy Percy,ancien sénateur américain mort en 1929, où une statue le représente en chevalier. Rigolo, et ça me permet ce soir de découvrir un peu plus le personnage (avec, déjà, des éléments qui finiront dans le jeu). Nous nous rendons ensuite du côté des rives du Mississippi, plus exactement au Walnut's Street Blues Bar, au 128 S Walnut Street. Son propriétaire, Danny, nous accueille à bras ouverts, et comme il est encore tôt et que nous sommes ses premiers clients, il prend le temps de discuter avec nous. Bar fumeur, boissons peu chères, musique à la carte quand je lui demande gentiment, ambiance de juke joint moderne (plutôt 70's), le lieu donne envie de repasser en soirée, quand il y a plus de monde (et un concert) afin d'en profiter à 100%. Faute de mieux, j'en profite pour y griller une cigarette (et oui, ici aussi, on peut) et faire un billard avec Edouard. Au plafond, comme au Under-the-Hill Saloon de Natchez, je constate qu'il y a des billets accrochés. Je demande à Danny s'il s'agit d'une tradition : il me répond qu'il n'en sait rien, mais qu'il a vu ça un jour dans un bar, qu'il a trouvé ça rigolo, et que depuis, il le refait. Il me dit aussi qu'il a un jour connu un bar dont le propriétaire se vantait d'avoir 1 million de dollars accrochés de la sorte au plafond. Et que le jour où il en fera autant, il décrochera tout, donnera son bar et prendra sa retraite. Même si la somme parait exagérée, en comptant très vite, il semble quand même y avoir un petit milliers de billets là-haut, et même à coups de 1$, ça fait, ça fait... Il nous fait ensuite signer son livre d'or et nous offre des stylos au nom du bar, avec la petite phrase "Come as a stranger, leave as a friend". Il est très sympathique et hyper chaleureux, et nous rappelle Eustace en cela. Peu avant que nosu partions, un couple dans la cinquantaine s'installe pas loin de nous, et le mari se lève pour venir nous saluer : il a entendu dire que des français étaient présents dans le bar et tenait à les rencontrer pour leur dire bonjour. Il se présente, nous serre la main et nous souhaite un excellent séjour aux Etats-Unis et nous souhaite un bon amusement à Greenville. C'est touchant. Malheureusement, le temps nous manque et nous devons déjà partir. Lorsque nous repartons, je propose de faire une expédition rapide en voiture sur les quais : nous nous engageons sous la grande arche d'accueil, montons la butte... et prenons une gigantesque claque dans la gueule : nous avons une vue magnifique du Mississippi sous le soleil couchant, avec une pente douce (prévue pour les bateaux) qui nous permet d'accéder directement au fleuve, et, tout autour, des arbres, avec la digue qui masque le reste de la ville. Epic win, et c'est reparti pour 10 minutes de photographies.

Mardi 17 mai, 20h, Benoit, MS

Nous rentrons enfin au shotgun shack d'Eustace après plusieurs arrêts en cours de route. Au programme :
- course poursuite  avec le soleil (Eustace nous dira plus tard qu'il est traditionnel ici de mettre sa main devant soi pour mesurer la distance entre le soleil et l'horizon, et quand il n'y a plus que la place des 4 doigts de la main, c'est qu'il reste à peine une heure de lumière ; de notre côté, on constate qu'en moins de 2 minutes, le soleil passe du "je touche la cime des arbres" à "je ne suis plus là, zou")
- poursuite du soleil couchant et recherche désespérée d'un joli carrefour rural en roulant dans des chemins de terre (mais pour ça, hélas, on a fait chou blanc)
- arrêt express sur un pont à l'approche de Benoît pour photographier une méandre morte du Mississippi à la tombée de la nuit

Nous déchargeons ensuite les courses pour faire un dernier barbecue. On hésitait à dîner dehors, mais on a préféré profiter de notre dernière nuit à la cabane. Eustace nous rejoint pour nous dépanner du charbon (qu'on a oublié comme des idiots) et nous aide à lancer le barbecue (la American HighSchool of BBQ est bien meilleure que la nôtre). Nous lui payons une bière et lui proposons de rester manger avec nous, chose qu'il refuse poliment alors qu'il est en train de faire cuire la viande à notre place. A force d'insistance, nous parvenons à le prendre en otage et il repart de la cabane 2 bonnes heures et bien des discussions plus tard.

Je ne m'attarderai pas sur cette soirée, mais la rencontre avec Eustace se sera révélée inoubliable, et semble être une parfaite illustration de la phrase du Walnut's Street Blues Bar : "Come as a stranger, leave as a friend", car nous sommes désormais les amis français de notre hôte, et, dit-il, les premiers à lui avoir proposé de partager un dîner, faisant un peu sauter le rapport propriétaire - client de la location AirBnB. En d'autres temps, en d'autres lieux, on aurait tout à fait pu devenir pote avec lui, du coup, ses mots ne sonnent ni creux, ni exagérés. Et nous savons déjà que nous prendrons des nouvelles de chacun, et que, pour notre part, nous reviendrons l'an prochain.

Demain matin, il est déjà temps de partir, pour prendre la route vers Lafayette, en passant par Eudora, Oak Grove, Lake Providence et bien d'autres, en longeant le Mississippi. Nous quitterons la petite ville de Benoit satisfaits, mais certainement avec un pincement au cœur au souvenir de notre hôte, face à notre envie grandissante de rester dans le coin et de revoir le Delta.

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