mercredi 30 mars 2011

B.O. pour Mississippi : mettez 1d20 de Blues dans votre vie

...mais avant toute chose : pourquoi tant tarder avant de faire un nouveau billet ? Hein, pourquoi, d'abord, sale chien de bloggeur qui ne tient pas ses délais ! Voyez-vous, ma bonne dame, ces derniers temps, ma vie, c'était un peu ça...
(Pour preuve, contre une bière, je suis tout à fait disposé à vous la chanter en karaoké lors d'une convention, et en rythme en plus, mais ceci est une autre histoire que je réserve aux petits bars enfumés de Liège...)

Or, so, donc. Nouveau boulot, horaires 5-13h / 13-21h plus fatigants que je ne le pensais, quelques trucs administratifs et personnels à gérer et un crash de mon PC la semaine dernière ne m'ont pas aidé à suivre le blog.
Alors, pour me faire pardonner, un petit billet à peu près dans l'actualité, là.

Programme du jour : compilation non-exhaustive des musiques d'ambiance à utiliser dans une partie de "Mississippi" !


A l'origine, lorsque j'ai commencé à écrire Mississippi, je ne me voyais pas masteriser autrement qu'en musique. Oui, mais la masterisation en musique, c'est comme une première fois : tout peu être gâché sur un faux-pas alors qu'on part motivé et rempli de bonnes intentions. Il faut tenir la cadence, garder le rythme, ne pas laisser de blanc, savoir épouser les formes de la narration, caresser la sensibilité des joueurs, maintenir leur attention et ne pas trop se disperser en préliminaires musicaux. Et, toujours, toujours, savoir surprendre.
J'en discutions il y a quelques temps avec les gens de mon asso montoise, les Forgeurs de Rêve. On aime bien ce genre de grandes discussions sur les théories et pratiques du jeu de rôle, de temps à autres. Ca nous permet de nous écharper régulièrement en toute amitié. Les premières critiques fusaient déjà : ça peut gâcher une partie, les thèmes sont parfois mal adaptés, on retrouve toujours les BO de Conan/LOTR qui tournent en boucle, les musiques trop connues (type LOTR) et leurs montées en puissance rendent les scènes téléphonées pour le peu qu'on veuille être synchro avec elles, on doit gueuler pour passer par-dessus la musique, ou au contraire, elle fait un vieux bruit de fond désagréable car à peine perceptible... Et en plus, pafois, le MJ se perd plus en s'improvisant DJ qu'en racontant sa scène.

Pour ma part, je pratique les parties en musique depuis ma seconde partie de Mississippi en convention. Et depuis, systématiquement, je fais ainsi, modulo les festivals ou les conventions en salles où les tables ne sont pas isolées (histoire de ne pas participer à la cacophonie générale en rajoutant du son). Avec deux types de playlists :
- la playlist "moments clés" : un thème spécifique pour la première visite d'un lieu particulier, pour introduire une musique marquante, poser une ambiance (certains morceaux un peu sombres de Lightning Hopkins sont parfaits pour une ambiance inquiétante) ou introduire un personnage. Généralement, je profite d'une pause clope pour préparer la lecture, j'ouvre la scène, je laisse 5 à 10 secondes d'introduction musicale puis je baisse doucement pour commencer mes explications, et baisse à nouveau pour laisser un léger fond sonore quand je laisse la parole aux PJ après avoir terminé ma description. En général, je note les titres quand je rédige le scénario, c'est du "fait pour".
- la playlist "ambiance" : elle sert plutôt de fond sonore et qui peut tourner en boucle tant qu'on est dans un même lieu/un même type de décor. J'en ai un paquet sous le bras, prêtes à l'usage. Leur utilisation est un peu plus "libre", je pense.

A nuancer dans cette dernière, deux sous-types :
- Les musiques que je pose arbitrairement à un décor parce que je trouve que ça rend bien
- Les musiques dites diégétiques, à savoir qui sont vraiment jouées/interprétées/chantées et que les personnages entendent réellement dans la scène (comme dans l'excellente série The Wire, où elle est généralement sur l'autoradio de la voiture d'un personnage ou le jukebox du bar où ils se trouvent, sauf pour les montages de fin de saison).  Ce dernier cas est un peu plus pointu à mettre en oeuvre : par exemple, s'ils rentrent dans un bar où un pianiste joue du Ragtime, si quelqu'un tire sur le pianiste, logiquement, la musique doit s'arrêter...

Ce qui m'a le plus posé de problème, c'est trouver quel bon blues mettre en fond sonore. On dit Blues, on pense forcément à Robert et Tommy Johnson... Mais avez-vous déjà écouté ? Les oeuvres de l'époque arrivent doucement sur leur siècle, et les enregistrement qu'il nous reste aujourd'hui ne sont pas d'une qualité exceptionnelle. Les sons sont un peu sales, criards, pas nécessairement compatibles avec une partie de jeux de rôle pour les raisons évoquées ci-dessus. Du coup, j'ai cherché, cherché, cherché... et j'ai fini par trouver de quoi faire. Tout n'est pas du Blues (masteriseriez-vous en Louisiane sans faire un peu de Jazz ?), tout n'est pas nécessairement antérieur aux années 30... mais on s'en fout, en fait. Peu importe l'anachronisme musical quand on masterise une vision fantasmée du sud des Etats-Unis, après tout. Le tout étant d'éviter les sons trop électriques, partant de là, j'estime que beaucoup est permis.

I) Frissons
Parce que pour un jeu qui se revendique d'un minimum d'horreur et de fantastique sombre, le frisson se doit d'être respecté. Et si c'est en musique, tant mieux. Ma petite perle, dans mes différentes découvertes, est le morceau ci-dessus, une version arrangée de Goin' Down South de R.L. Burnside. Bon, bien sur, pour d'autres types de jeux, on peut trouver plus effrayant, néanmoins, elle a le mérite d'être lancinante. Je me la réserve généralement aux cliffhangers entre actes, genre "vous retrouvez votre contact pendu et lacéré, et maintenant ?".
Une autre pour laquelle j'ai une affection particulière, où la qualité de son joue justement en sa faveur, c'est Lonesome Dog Blues de Lightning Hopkins. Le son est glauque, triste, inquiétant, indéfinissable. Elle a largement tendance à me faire dresser les poils sur les bras. Et aussi les oreilles de mes joueurs quand ils entendent les premières notes.
J'ai emprunté la troisième musique représentative du genre à la B.O. de Bioshock 2 (il faut croire que les jeux vidéos années 50-like, type Bioshock ou Fallout, mettent un point d'honneur à avoir une bonne B.O.). Il s'agit de Nightmare, d'Artie Shaw (celui qui s'effeuillait le coeur, oh-oh-oh). Là aussi, un morceau lancinant qui passe à merveille dans une ambiance sombre, aux percussions qui nous envoient tout droit en barque dans le bayou à l'approche d'une cérémonie vaudou du Quimbanda.

II) Baston / Action
Parce que, là aussi, ça fait tout. Existe-t-il du Blues de combat ? Difficile à dire. Du coup j'ai un peu improvisé. Je me suis dit que ça devait dépoter, envoyer du bois. Avoir un rythme soutenu, des solos déchaînés. Et, au final, bien souvent, de l'harmonica ou de grosses voix masculines faisant "Wooooooooooh !". Pas très épique ou dramatique, mais tant mieux, ce n'est pas comme cela que je voyais le combat dans Mississippi. Loin des duels de western ou des batailles rangées médiévales, j'imaginais plutôt des batailles de bar ou de rue, entre le pugilat et la débandade, interrompue par les crissements d'une voiture de police alors que tout le monde prend ses jambes à son cou pour ne pas finir en cellule. Et soudain, la lumière ci-dessus : Duelling Banjos, issue de la B.O. de l'excellent film Deliverance (âmes sensibles s'abstenir cependant) reprise par les Hayseed Dixies, groupe de rednecks déjantés spécialistes de la reprise au banjo (qui vous revisitent AC/DC et Queens de façon très... sudiste). Pourquoi cette version ? Parce que la version du film incluait un dialogue au milieu, tout bêtement. Bon, celle-ci est un peu particulière : plutôt redneck, commençant lentement, je me la réserve à des scènes un peu burlesques/grotesques et la joue dès que la situation commence à dégénérer (quand je sais que d'ici moins d'une minute, le PJ ou le PNJ va lancer le premier coup de poing).
Dans un autre registre, j'ai aussi pris Boogie Thang dans une version survoltée du James Cotton Band. Bon, clairement plus bagarre de bar. Un bar enfumé dans les bas-fonds. Avec, limite, le groupe qui continue de jouer son morceau tandis que les bouteilles et les gens volent par-dessus les tables. Toujours dans le même style, Rolling and Tumbling interprété par Little Walter. J'avais mis la main sur un super live, mais, hélas, je ne le retrouve plus en streaming... Sur la même rythmique, If I had Possession Over Judgement Day fait tout autant son office. Plusieurs versions traînent, à vous de choisir, du coup je me fais plaisir en mettant une excellente reprise live par Clapton. Pour les combats, j'ai beaucoup moins de scrupule à prendre du live (le public de la chanson pouvant tout à fait servir d'assemblée dans la scène, et la guitare électrique colle presque plus à la nervosité de la dite scène). Pour finir, un John Lee Boogie de John Mayall, toujours parfait pour partir sur les chapeaux de roue. Je l'avais testée pour une course poursuite, option "tirer à la fenêtre sur la voiture d'en face pour lui crever les pneus", c'était passé divinement.

III) Ambiance et fourre-tout, artiste par artiste
Parce que le temps commence à me manquer, du coup je vais faire court pour finir ce billet (je ne pensais pas m'égarer autant).
Quelques grosses découvertes idéales en fond sonore, donc :
L'album Road Movie de Rag Mama Rag : un excellent Blues accoustique, quelques thèmes bien pêchus, la plupart du temps instrumental donc idéal pour les parties. Morceaux choisis : "Last Train to Baton Rouge", "The Bossman" (idéal pour le milieu mafieux de Louisiane), "Bounty Hunters" (en électrique, pour une arrivée de flics rednecks bien peu subtils), "Bikers Club" (pour un club de Nouvelle Orléans), "Delta Swamp", "
L'album "Negro Prison Camp Work Song", pour parfaitement illustrer les travailleurs chantant le gospel dans leur champ, et dans une certaine mesure les pauvres hobos chantant la nuit dans les rues autour d'un feu improvisé dans une poubelle. Voix masculines, pas d'instruments, l'ancêtre du blues au format mp3. Une de mes plus récentes découvertes (merci Gargarine).
L'album Classic Mountains Songs from Smithosian Folkways, la même côté sudistes, dira-t-on pour résumer brièvement.
La B.O. de O'Brothers, source d'inspiration majeure pour Mississippi. En plus du classique "I am a man of constant sorrow", une excellente reprise de "Hard Time Killing Floor" en guitare + voix avec un son nickel qui peut tout à fait servir de fond de scène, un "Down in the river to pray" (si vos bluesmen vont jouer les culs-trempés du côté de Clevelande lors d'une procession dans le Mississippi), "O Death" et quelques autres super morceaux très sudistes (mais pas forcément Blues, pour apporter un peu de variété).
- Un peu plus country/traditionnel américain, le Nitty Grit Dirty Band apporte quelques ballades sympathiques pour illustrer la riante campagne du sud des Etats Unis
- Toujours entre le Blues et le Redneck, Mountain Men a fait un album des plus sympathiques, Spring Time Coming. Mention spéciale à "Les Marquises", un des rares morceaux du genre que j'ai pu trouver en français (n'oublions pas les cadiens !). Si la voix se prête assez mal à la musique de fond, l'intro musicale peut tout à fait accompagner une scène émouvante, voire poignante.
- Dans la mouvance plus sudiste/accoustique, Doc Watson a fait un très bon Vanguard Visionnaries très rednecks dans le son, et qui passe tout à fait bien en musique de fond.
- Dani Tzukerman fournit d'excellents morceaux dans l'album Sanhedrin. Mention spéciale à "Hellhounds on my Trail", magistrale reprise du morceau d'origine de Robert Johnson, lancinante à souhait, lente à en être presque menaçante. Rappelons que les Hellhounds du Malin sont un ennemi présent dans le bestiaire... Mais on trouve aussi "Blues in a Bottle", "Big Bill" ou encore "D.Z. Thang" en instrumental, et enfin "Me and the Devil".
- Big Dave McLean, très grosse référence dans l'album Acoustic Blues - Got 'Em From the Bottom : des morceaux relativement traditionnels inspirés des riffs du delta blues originel, une grosse voix mais pas trop forte, de l'accoustique, un bon son, bref, parfait pour picorer ça et là ce qu'il nous faut.

Enfin, pour finir, quelques artistes dont il ne faut pas se priver de piller la pléiade de morceaux pour diverses illustrations de fond :
- Harry James qui déborde un peu sur le swing et le ragtime (par exemple "Moten Wing"), pour toutes les soirées huppées, de Vicksburg à Bâton Rouge
- Dans le même style, Louis Jordan (exemple : Choo Choo Ch'Boogie)
- ...

Bon, je me rends compte à la relecture que le billet est passablement bâclé. Ca fait bientôt deux ans que je fouille les discographies pour composer des B.O. de scénar' aux petits oignons, c'est qu'à force, je commence à accumuler de façon assez sévère.
J'essayerai d'y revenir, à l'occasion.

En attendant... bonne audition à tous !

3 commentaires:

  1. Et tu ne mets même pas de John Lee Hocker : http://www.youtube.com/watch?v=zYrVwGxlcFA
    Tsss...
    ^^

    Thomas

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  2. Il n'y a pas moyen de ne pas couper les articles dans les flux rss ? Tout le principe d'un flux c'est de pouvoir tout suivre depuis son collecteur et pas d'être obligé de charger chacun des sites les uns après les autres... :/

    --
    igor

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  3. Thomas : bah, oui, bien sur. Mais il y en a tellement à mettre...
    Igor : et mes visites, alors, hein ? Elles incrémentent mon compteur de visites, tes lectures rss, hein ? ... bon, ok, c'est modifié.

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