mardi 15 février 2011

JdR & romance : what is love ?

Oui, bon, après ce week-end d'absence pour Magic et St Valentin, aborder la romance et le jeu de rôle, c'est un peu facile. Certes. Mais j'assume.
Pendant un long moment, la femme représentait cinq (bon, allez, quatre et demi à cause du doublé sage/sorcière) grands types de personnages dans les intrigues de jeux de rôle (je vous passe l'elfe, la magicienne et autre) :
- la demoiselle en détresse, option yeux de biche, enfermée en haut de sa tour gardée par un dragon
- la traitresse, femme de pouvoir ou amante des puissants, souvent lascive et cruelle
- la sage mystique, conservatrice d'un savoir ancestral, grande magicienne, femme d'église ou mère du monde (et son opposé/affilié, à savoir la sorcière)
- la bourrine impétueuse et indomptable, véritable garçon manqué, mais qui garde son 95D, voire E, et dotée de son bustier à plaques option décolleté blindé, aussi appelé Chainmail Bikini

C'est bien beau, tout ça. Mais, dites-moi, dans tout ça, où est l'amour, hein ?
Ou plutôt : quel est le rapport des personnages de jeu de rôle avec l'amour. Arrêtez-moi si je me trompe, mais il me semble qu'en général, deux choses se passent :
- soit tous les personnages sont d'insatiables coureurs de jupons pour qui l'amour n'existe pas : la vie est alors une longue succession de serveuses d'auberge séduites dans le seul but de justifier le quota de jets de Charisme et de Séduction (éventuellement de Domination pour les moches qui préfèrent l'hypnose).
- soit ce sont tous de fiers célibataires endurcis pour qui le sexe, l'amour et le câlin sont des concepts aussi abstraits que la faim, l'envie d'aller aux toilettes ou le mal du pays : "Terminator ne fait pas dans les sentiments, Terminator parcourt le monde pour tuer des dragons et des zombies".

Et tant mieux, dirons certains. Cela évite de transformer les parties en sim-like (bien que cet aspect semble plaire énormément quand il est inclus dans les jeux de rôle sur console, par exemple Fable), d'avoir trop d'étalage de niaiseries entre deux donjons, ou d'éviter que les couples fassent systématiquement des personnages qui, eux aussi, sont en couple (l'homme jouant l'homme, et la femme, quelle surprise... jouant la femme). Ca peut s'expliquer par deux choses, je pense :
- la première : sur un format one-shot, on n'a tout simplement pas le temps de développer ces aspects du personnage.
- la seconde : sur une campagne, les personnages jouent rarement monsieur ou madame dupont, ils ne sont pas M et Mme tout-le-monde, ce sont des héros. Célibataires, veufs ou volages. Et qui, généralement, doivent sauver le monde d'une menace cosmique, d'un mal pernicieux, d'une invasion de zombie ou d'une troisième guerre mondiale. Pas le temps pour les sentiments. Et dans Saint Seiya, pas le temps de manger ou d'aller aux toilettes, Athena perd son sang et risque de périr noyée dans 12 heures, il faut traverser le sanctuaire.
S'y ajoutent deux raisons annexes :
- côté MJ : s'il peut être facile pour le joueur de créer un background, un historique à son personnage, incluant une amante ou une famille, il n'est guère aisé pour le MJ d'en jouer. Le rapport temps consacré / intérêt ludique est généralement faible, très faible.
- côté PJ : ce genre de traits ne peut être généralement utilisé par le MJ que pour faire du tort au personnage. Tromperie, kidnapping, menace ou chantage, le compagnon ou la compagne devient un véritable handicap sur pattes potentiel. De plus, pour les joueurs amateurs de systèmes très chiffrés axés sur le simulationnisme, ça ne donne pas de buff de caractéristique, c'est donc superflu, donc inutile.

Pourtant, si on passe par-dessus ce dernier point, il y a de véritables possibilités de rebondir dessus, pour le MJ. Dans un cadre de campagne, donc, plus qu'un cadre one-shot. Rebondir sur une relation et en faire l'objet d'un scénario ou d'un arc annexe. En 1916, George Polti proposait la théorie du "36 situations dramatiques", dont on peut trouver une présentation wikipedia ici. Sa théorie, donc, est que pour chaque type de scénario, il existe 36 situations dramatiques de base qui motivent l'intrigue ou en sont le point de départ.
Petit florilège de ces situations pouvant être générées par la romance d'un personnage joueur avec un autre, même PNJ :
- "Sauver : un personnage se propose pour en sauver un ou plusieurs autres"
- "Venger un proche : une vengeance au sein d’une même famille"
- "Posséder : un désir de possession (un bien, un être, etc.) contrevenue"
- "Adultère meurtrier : pour posséder son amante, un personnage tue son mari"
- "Tuer un des siens inconnus : un personnage tue un proche sans le savoir"
- "Crimes d'amour : un personnage amoureux s’égare et commet un crime"
- "Le déshonneur d'un être aimé : l’être aimé se livre à des activités répréhensibles"
- "Amours empêchées : un amour est entravé par la famille ou la société"
- "Aimer l’ennemi  : un personnage en aime un autre même s'il est son ennemi"
- "Jalousie : méprise et jalousie amènent un personnage à poser des actes regrettables"

Soit tout pile une dizaine de bases d'intrigues qui pourraient rebondir sur les relations entre un PJ et un PNJ, et sur quoi un MJ cruel pourrait rebondir sans aucun regret. Votre investigateur part trop souvent pour enquêter sur le mythe des grands anciens, laissant sa femme seule pendant des mois avec ses marmots ? Méfiez-vous, à son retour, il pourrait retrouver son épouse éplorée par la perte prématurée d'un enfant, fragilisée mentalement et manipulée par une secte dont elle a embrassé la cause, de désespoir. Besoin de mettre votre groupe dans une position de fugitifs ? Un amour interdit et une histoire de clans rivaux peuvent tout à fait convenir à cela. Des PJ trop discrets qui échappent au grand méchant ? Pas besoin de lui donner l'omniscience : une serveuse d'auberge abusée par un beau-parleur qui ne comptait pas la revoir le lendemain peut tout à fait aller le dénoncer, s'estimant salie.

Certes, bon. Tout cela est bien négatif et revient surtout à se donner le bâton pour se faire taper dessus par le MJ. Mais s'il y a bien une chose qui est savoureuse dans le cadre de campagnes, c'est de voir l'historique de son personnage réutilisé dans l'intrigue. Dans tous les cas, les personnages traversent rarement une campagne indemnes. Et, parfois, à moins que le monde ne soit au bord de la destruction et ne nécessite l'intervention spécifique du groupe, les personnages peuvent se sentir assez peu impliqués, si l'intrigue ou la menace est trop générique. Prendre appui sur leur vécu, romances comprises, peut permettre de réellement les mettre de plein pied dans l'enquête ou l'aventure.
J'en profite pour un petit coup de pub, loin des sentiers battus du jeu de rôle habituel, pour faire un peu de lumières sur Romance Erotique, jeu de rôle (principalement pour couples) de mon compère forgesongien Nonène qui supervise le développement de Mississippi. Au programme : définition rapide du personnage sur cinq points, puis mise en jeu d'une romance en trois points, qui sont la rencontre, le premier rendez-vous et enfin le premier moment intime. Les joueurs sont MJ à tour de rôle., et l'objectif est de séduire l'autre par la narration d'une ou de plusieurs scènes. Chaque séduction réussie (les actions sont mesurées en tirant des billes de couleur) offre des points d'érotisme, qui peuvent être dépensés pour divers gestes, caresses et actes. Projet ambitieux et audacieux s'il en est, qui a eu de bons retours de la part des testeurs. Pas essayé encore pour ma part, mais la lecture promet de sacrés moments pimentés.

Alors, pour le 14 février 2012, jouerez-vous en couple ? Ou vos personnages se caseront-ils enfin, en attendant que le couperet du meneur tombe sur leur idylle ? ;)

D'ici là, n'hésitez pas à laisser vos expériences et le retour de vos tentatives sur le sujet en commentaire !

1 commentaire:

  1. Il me semble que ce n'est pas Nonène mais un certain "Jelino" qui est l'auteur de ce jeu. C'est du moins ce qui est écrit sur le PDF.

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